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Discours du président de la CID du 4 mai 2025

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Préparer l’avenir, c’est ce que nous faisons tous ici, instance publique, personnel du mémorial et associations de mémoire de tous pays, autour des valeurs que nous ont légués les survivants. Nous veillons à porter un regard seulement objectif sur le passé, mais sans concession, et nous traitons celui-ci comme le champ d’expérience dont l’analyse est nécessaire pour trouver les bonnes voies du futur. Enfin nous partageons cette connaissance avec les jeunes générations de la façon la plus adéquate possible, guidés par la notion du « Plus Jamais »

 

A l’occasion de ce 80ème anniversaire de la libération du camp de Dachau, Le Comité International de Dachau est très heureux de pouvoir vous accueillir au côté du Directeur de la Fondation des Mémoriaux bavarois, Mr Karl Freller, et de la Directrice du Mémorial de Dachau, Mme Gabriele Hammermann.


Vous êtes venus très nombreux. Parmi vous de nombreux descendants de victimes et de survivants, venus de nombreux pays. Par-dessus tout, nous sommes honorés par la présence de déportés survivants et libérateurs, accompagnés de leurs proches. Nous nous réjouissons également de la présence de descendants de libérateurs et de combattants américains, au côté de représentants de la 42ème et 45ème Divisions US, en active ou retraité.


En avril 1945, les efforts conjugués de ces unités ont permis de libérer le secteur de la ville de Dachau et enfin le camp de Dachau. Auparavant, à l’approche des combats et bombardements incessants voisins, le bruit courait dans le camp que la libération était proche, ou à l’opposé certains craignaient que le camp soit évacué pour quelques destinations funestes.


C’est dans ce contexte que le premier Comité International de Prisonniers s’est constitué, sous la conduite de Patrick O’LERAY, avec les détenus les plus valides, pour organiser la sécurité des prisonniers contre les gardiens SS jusqu’à la libération du camp, dans le cas ou ceux-ci tenteraient d’évacuer le camp ou de liquider les déportés.


Le 30 avril, dans le camp enfin libéré, la meilleure entente s’installe entre ce Comité et le commandement américain pour apporter les premiers soins d’urgence aux détenus et pour assurer les meilleures conditions de rapatriement vers leur pays d’origine. Beaucoup mourront encore dans les jours qui suivent tellement leur état physique était dégradé. Le 8 mai 1945, Arthur Haulot prend le relais de Patrick O’LERAY qui doit partir pour Londres. Fin juin 1945, le camp était pratiquement évacué.


C’est une formidable chance que de pouvoir réunir aujourd’hui les descendants des uns et des autres. Il y a un instant, le petit fil de Arthur Haulot précédait le cortège avec le livre des 40 000 morts à Dachau et dans ses camps extérieurs.
Par suite de l’intervention du CID auprès de l’Etat fédéral, le site du camp promis à l’abandon acquiert le statut de mémorial en 1965. Sous la tutelle de l’Etat de Bavières, le Mémorial progresse au travers de plusieurs étapes pour atteindre l’ampleur et le succès qu’on lui connait, avec chaque année son million de visiteurs de toutes nations.
En 2003, prenait naissance la Fondation Bavaroise des Mémoriaux, dont l’action s’est révélée déterminante dans la politique de Mémoire ouverte à tous les publics, pour le Mémorial de Dachau et pour le Mémorial de Flossenburg, et qui s’étend progressivement jusqu’aux vestiges des Kommandos.


Si je me permets ce rappel historique, c’est pour souligner l’investissement et le combat sans relâche de tous les acteurs, réunis en ce jour, pour le travail de mémoire autour de la plus grande tragédie de l’humanité, provoquée par la suprématie des idéaux du national-socialisme.


Il nous faut aussi saluer les efforts de toutes les équipes qui ont œuvré à l’organisation de ce rassemblement, aux préoccupations multiples mais gérées avec le plus grand soin. De la même manière qu’a pu le faire le Général André Delpech à l’occasion du 50ème anniversaire, le Comité International de Dachau exprime sa reconnaissance à La Fondation, au Mémorial et à toutes leurs équipes pour tout cet investissement passé et présent, au nom de la Liberté et de la Dignité Humaine.


Les ambitions ne s’arrêtent pas là, puisque déjà se dessine, pour les années à venir, un grand projet de transformation de ce mémorial, ambitieux et nécessaire, et pour lequel nous nourrissons tous les espoirs et les plus grandes attentes. Ce projet témoigne de la persévérance de tous an faveur de la Mémoire, et constituera demain un outil pédagogique de premier ordre en direction des nouvelles générations.


Ce projet s’élève aussi comme la réponse indispensable contre les courants de pensée négationniste qui revisitent de plus en plus l’histoire, ou qui parfois nous invitent à s’épancher un peu moins sur le passé, et à ne se concentrer que sur l’avenir, dont on peut craindre les contours qu’il pourrait prendre.


Préparer l’avenir, c’est ce que nous faisons tous ici, instance publique, personnel du mémorial et associations de mémoire de tous pays, autour des valeurs que nous ont légués les survivants. Nous veillons à porter un regard seulement objectif sur le passé, mais sans concession, et nous traitons celui-ci comme le champ d’expérience dont l’analyse est nécessaire pour trouver les bonnes voies du futur. Enfin nous partageons cette connaissance avec les jeunes générations de la façon la plus adéquate possible, guidés par la notion du « Plus Jamais »


Dans l’esprit des déportés survivants, et ils le diront mieux que moi dans un instant, PLUS JAMAIS, ne se limite pas, comme on pourrait être tenté de le penser, à « Plus jamais de camp de concentration, plus jamais de camp d’extermination, plus jamais de génocides ».


Si on se réfère au serment prononcé par les anciens déportés de Dachau sur la colline du Leinteinberg, le 29 avril 1955, « PLUS JAMAIS » c’est aussi, et dans le texte, « plus jamais de peuple attaqué et asservi », c’est aussi la volonté de « rapprocher les peuples dans la paix en vue d’assurer leur sécurité, leur indépendance et la liberté »


Le serment se révèle ainsi comme un formidable élan en faveur d’une Europe Unie et d’un monde libre.


Pourtant depuis 1945, les guerres n’ont cessé de se succéder, de plus ou moins grande envergure, alternant périodes de tensions et périodes de paix heureuses, ou relatives. On pourrait penser finalement que le seuil de la ligne rouge du PLUS JAMAIS a été placé au plus haut, autorisant ainsi tous les méfaits en-dessous, qui arrivent actuellement à leur paroxysme : retour des grands blocs géopolitiques aux ambitions territoriales et économiques, violation des frontières, manipulation et désinformation auprès des populations, xénophobie, antisémitisme, obscurantisme, violences sociales, mise à l’épreuve de nos démocraties. En quelque sorte, le retour de toutes les menaces et de tous les maux, auxquelles cependant un front cherche son unité et s’attache à résister.


Si nous sommes réunis aujourd’hui, c’est pour rappeler la vraie ligne rouge placée par les déportés survivants : celle des actes au quotidien, celle des droits élémentaires, et pour cela celle des devoirs de chacun, le tout porté par une vraie vision humaniste, solidaire et vertueuse.


Dépasser cette ligne rouge, à son niveau le plus élémentaire, c’est faire ombrage à la mémoire de toutes les victimes de ce camp et de ses kommandos, c’est faire ombrage à la mémoire des combattants qui ont donné leur vie pour notre liberté.


Cette année, l’hommage aux gerbes que nous allons observer dans quelques minutes vous invite, dans une formule nouvelle et symbolique, à vous recueillir en front uni et à retrouver le vrai sens de l‘inscription « Plus Jamais » qui se dresse devant nous.


Merci pour votre attention


Je vous remercie pour votre attention.

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